lundi 15 février 2016

L'écologie n'est pas socialo-compatible.


Trois nouveaux ministres se réclamant de l'écologie viennent de la trahir !
Se fourvoyer au sein d'un gouvernement social-libéral était et reste suicidaire.
Ceux qui s'y étaient essayé, dans le gouvernement Ayrault, ont déchanté.
Ceux qui viennent d'entrer dans un exécutif Vals, en fin de parcours, ne pèseront pas et se sont déconsidérés.

EELV a cessé d'être l'outil pouvant faire progresser l'écologie politique.
Mais, depuis qu'est né le mouvement écologiste, ne savait-on pas déjà qu'un parti ne peut jouer ce rôle ?
C'est, aujourd'hui, dit Noël Mamère, une formation « en soins palliatifs ».
Autrement dit, c'est un instrument usé, obsolète, mort.

Sera-ce la chance de l'écologie de devoir se refonder en actes et en idées ?
D'André Gorz à Nicolas Hulot, puis à Pierre Rhabi, on sait dans quelle direction aller
Fondateur des Verts, René Dumont, se disait « à la gauche de la gauche », radicalement anti-capitaliste.
Sans un retour aux sources, l'écologie n'aurait plus aucune expression spécifique et autonome.

La radicalité n'est pas l'extrêmisme. L'écologie est radicale ; elle n'est pas dans l'excès.
La gauche, dans toutes ses composantes, est à repenser quitte à changer de nom.
L'écologie en est désormais le cœur.
Car, par-dessus tout, il y a incompatibilité entre l'écologie et l'économie libérale.

Le pouvoir ne se prend plus par les urnes ni d'ailleurs par les armes.
Il se prend par la vie, par l'échange et le débat qui construit l'opinion.
Ainsi le veut l'écologie : la politique a changé d'âme et les schémas classiques sont dévalués.
L'opposition public-privé, par exemple, ne recouvre plus totalement le conflit droite-gauche.

L'État n'est pas tout le public et l'en commun déborde l'initiative privée ou l'entreprise.
L'écologie a rejoint les coopératives, les mutuelles, les associations « à but non lucratif », toutes à revitaliser.
La privatisation, qui en est le contraire, est même voulue et organisée par les gouvernements !
L'abandon par la social-démocratie de ces outils anticapitalistes a engendré une rupture.

La fin des privilèges, proclamée pendant la nuit du 4 août1789, n'est plus garantie par l'État.
L'intérêt général, né au XVIIIe siècle, avec Rousseau, n'est plus assuré par « les pouvoirs publics »
La chose publique, la res-publicae, la République elle-même, ne s'appuie plus guère sur les services publics.
L'écologie n'est concevable que dans une société qui se libère du pouvoir de la finance

L'écologie est, dès lors, la remise à l'endroit de l'économie : la bonne gestion de « la maison commune ».
Elle privilégie le travail face au capital.
Car le travail est beaucoup plus que l'emploi qui ne cesse de régresser en temps et en effectifs.
Le temps de la croissance est révolu.

Les citoyens ont à prendre leur vie en main et s'ils le veulent ils ont à en prendre les moyens
Ils n'ont plus à être gouvernés mais à se gouverner.
L'utopie écologique a cessé d'en être une.
C'est de croire en la perpétuation d'un modèle économique dépassé qui est utopique car non pérenne.

La révolution n'est plus une bataille pour la conquête violente du pouvoir !
C'est un renversement idéologique.
Il accompagne une mutation irréversible qui se produit lentement.
Les tenants de l'écologie ont d'abord à expliquer, à accompagner et à organiser cette mutation.

Vouloir « avoir des places et des postes » pour pouvoir agir écologiquement sur le réel est vain et stupide.
C'est une trahison parce que c'est tourner le dos à l'avenir qu'on ne peut plus envisager différent.
C'est penser la politique comme on la pensait au siècle dernier et même avant.
C'est penser trop court et conduit à faire des compromis qui sont des compromissions.

Laissons mourir un petit parti écologique inefficace mais faisons vivre l'écologie.
Laissons le social-libéralisme lui-même se détruire dans l'État et les partis qui le soutiennent actuellement.
N'accompagnons pas une fin de règne programmée : l'écologie à tout à y perdre.
Dépassons les logiques électorales qui nous piègent et qui ramèneront la droite extrême aux affaires.

Programmons, au contraire, notre mise en perspective politique :
Sortons des institutions monarchiques qui permettent l'autoritarisme totalitaire.
Opposons-nous à la démocratie inégalitaire qui n'a plus rien de démocratique.
Libérons la politique de la domination économiste.

Nous devons penser la France dans le monde au lieu de mondialiser la France !
Abandonnons ce qui nous ruine à commencer par les nucléaires.
Formons tous les citoyens en permanence plutôt que de sombrer dans l'élitisme.
Donnons à chaque humain assez pour vivre en partageant entre tous nos richesses.

Ne nous contentons pas de respecter la nature, mais remettons-y l'homme à sa place.
Vivons dans cette « Maison commune » ou Gaïa, la Terre-mère, sans en épuiser les ressouces.
Opposons-nous aux puissances qui veulent, indûment, dominer la planète et l'exploiter.
Préparons les générations nouvelles à cet autre monde qui vient.

La « trahison des clercs » (des intellectuels, des chercheurs, des universitaires) est la plus grave.
On oubliera vite les Placé, Pompili et autre Cosse.
Ils se sont trahis eux-mêmes et ont perdu ainsi, hélas, leur droit à la considération.
La pire trahison aura été, de fait, le renoncement à l'écologie politique elle-même.

Car Vals, Hollande et nombre de ministricules sont hostiles à toute écologie.
Ils sont infréquentables, ils ont été les premiers à se trahir et il n'y a rien à attendre d'eux.
L'abstention massive, la montée du FN, la banalisation de l'idéologie libérale l'ont déjà démontré.
Le désespoir des sans emplois, l'égoïsme d'État qui fustige les réfugiés le prouvent tout autant...

La déchéance de la nationalité n'est pas à installer dans la constitution : elle est déjà dans toute la société !
Il y a inégalité entre les citoyens, on a séparé les bons et les mauvais et fondé l'ordre sur la répression.
Là n'est pas la Cité réelle, c'est devenu un corps social brutal, sans vitalité, sans projet commun.
Mais la trahison des trahisons, c'est d'avoir installé la réussite dans le culte de l'argent.

Ceux qui tolèrent cette médiocrité politique, cette absence de créativité, génèrent la violence.
On déplore, on dénonce, on prétend combattre le terrorisme, mais sans savoir l'expliquer.
On ne vient pas à bout du fanatisme par des discours et des bombes.
Il faut en éradiquer les causes idéologiques, ce qu'on ne fait pas ou que l'on fait mal.

L'écologie politique c'est l'art du vivre sur Terre, ensemble, avec tout le vivant.
Notre civilisation ne se fonde pas encore sur cette proximité de l'animal, du végétal et du minéral.
Elle ne sait la regarder, l'entendre, l'aimer et elle lui préfére la concurrence et la rivalité.
Toutes les trahisons, petites et grandes, se rejoignent dans cette trahison de notre espèce.

De siècle en siècle, se sont élargis les domaines de la violence.
Nous avons progressivement éteint les lumières de l'espérance.
Il nous est offert de survivre en attendant la mort : ultime trahison.
La seule politique qui vaille est celle qui donne envie de vivre, d'agir et qui ouvre des futurs heureux.

Ce sont l'écologie et pas l'écologisme, les écologues et pas les écologistes qui fondent la politique.
L'écologue n'est pas qu'un scientifique, c'est un bâtisseur de projets à venir.
« Il n'est plus, désormais, de politique, d'organisation du vivre ensemble sur Terre, qu'écologique ».
Cette phrase, écrite le 5 décembre 2015, je la maintiens et la re-signe.



mercredi 10 février 2016

Les réfugiés privés de refuges

Chaque jour nous apprenons de nouveaux drames : la Méditerranée est devenue le cimetière des "malchanceux" que la tempête ou les criminels ont envoyé par le fond.

La solidarité des humains n'est, pour une partie des opinions publiques, qu'une tentation laxiste à laquelle il faudrait savoir s'opposer pour protéger les populations européennes de l'envahissement des misérables et de l'intrusion des extrémistes musulmans qui se mêleraient à eux !

C'est une erreur stupide et un faute lourde que de refuser d'accueillir les réfugiés qui fuient, avec leurs enfants, en famille, la mort, la misère et la famine. On n'arrêtera pas, du reste, le flux des exilés qui préfèrent affronter les risques de la mort par naufrage plutôt que de continuer à subir, dans leur propre pays, des violences inouïes et sans fin. Nous ne pouvons, notamment en France, continuer à  renier nos valeurs en abandonnant dans le froid, la boue et la peur les personnes qui stagnent à Calais et Grande-Synthe, dans le Nord de la France, bloqués face au Royaume-Uni.

Nous allons payer très cher cette inhumanité qui, dans toute l'Europe, conduit à tenter d'interdire l'accès à nos pays soit disant démocratiques. Les contradictions et les incohérences ont commencé, d'ailleurs, à nous mettre en porte à faux ! Contradiction, en effet, que de continuer à nous réclamer des Droits de l'homme tout en écartant toute recherche d'une concertation en vue d'une répartition de l'effort, assurément considérable, qu'ont à effectuer les peuples qui voient arriver des centaines de milliers de réfugiés, nullement migrants et qui n'espèrent plus qu'en nous. Incohérence, plus encore, que de vouloir fermer, en vain, nos frontières. Nous ne pouvons ni arrêter ni supprimer les arrivants qui ont tout quitté et n'envisageraient de repartir que si disparaissaient les causes multiples et profondes de leur fuite vers l'inconnu !

Mais il est d'autres contradictions et d'autres incohérences encore. Nous avons oublié l'exode tragique des Français, en 1940. Nous avons oublié que des millions et des millions d'Allemands et d'Allemandes ont été réfugié(e)s, maltraité(e)s, violé(e)s, en 1945. Nous oublions que des millions de Syriens ont déjà fui au Liban, en Jordanie et en Turquie. Nous oublions que les Irakiens, les Afghans, les Érythréens qui, en plus des Syriens, tentent de trouver un avenir en Europe, sont les victimes de guerres qui ont été déclenchées souvent par des Occidentaux, et notamment par les USA. Nous oublions que les arrivants, désespérés s'ils sont massivement repoussés, ne pourraient, un jour, que se retourner contre nous. Nous oublions que, sauf à éliminer physiquement tous les réfugiés, (perspective qui n'est envisageable que par des néo-nazis !), ces autres humains finiront, avec le temps, à partager nos vies. Nous oublions, en bref, que l'Europe comme les Amériques ont été, sont et demeureront (ce qui fait leur force) des terres d'immigration.

Les insensés et les fanatiques qui ne veulent "aucun migrant chez nous" iraient-ils jusqu'au bout de leur irascibilité en faisant appel à l'armée, non seulement pour canonner les bateaux des passeurs mais pour mitrailler les foules qui franchissent nos frontières sans droit ni titre ?

L'hebdomadaire le 1, daté du 10 février 2016, sous la plume de Laurent Godé qui écrit Ci-git la France, dénonce cet égoïsme tragique qui ne peut conduire qu'à des flambées de racisme meurtrières et inefficaces s'il s'agit d'éviter l'entrée de nouveaux arrivants en Europe. Quand on a connu les atrocités de l'armée de Bachar el Assad, les épouvantes liées aux crimes multiples du pseudo "état islamique", sans oublier les massacres perpétrés par les avions russes, on ne craint plus les brutalités, ni même les risques de pogroms que les nationalistes de toutes sortes n'hésitent pas à envisager voire à réaliser, soit disant au nom de notre culture judéo-chrétienne, contre toute évidence si l'on entend la parole du Pape François (2) !

Quand la mer use de toute son énergie, on ne l'arrête pas, même avec des digues. "L'hospitalité n'est pas un devoir, c'est un droit" s'exclamait, le 17 septembre 2015, l'historien Patrick Boucheron, nouveau membre du Collège de France (1). Quiconque apparaît sur Terre a droit à la sollicitude de tous les autres êtres humains. C'est, sinon, la fin de la civilisation ! Des philosophes des Lumières jusqu'au Pape François, venu à Lampedusa, une seule exigence s'est exprimée : la solidarité et la fraternité entre tous les habitants de "la Maison commune" est notre unique horizon. Y renoncer serait détruire en nous notre humanité même !

Rien n'arrêtera les réfugiés car ils n'ont d'autre choix qu'entre le maigre espoir de trouver un avenir (en partant) ou l'absence totale d'espoir (s'ils demeurent là où les moyens élémentaires de vivre ont disparu). Selon le HCR (l'Agence des Nations unies pour les Réfugiés), 60 millions de "Sans-terre", un humain sur 122, ont dû quitter leur pays d'origine. C'est énorme et ce n'est rien ! Ce n'est pas une question de nombre ! Qu'est-ce qu'un à deux millions de nouveaux venus dans une Europe de plus de 500 millions d'habitants ?

Angela Merkel, le véritable "homme politique" en Europe, a su dire que son pays ne fuirait pas ses responsabilités, en dépit des difficultés qui s'accumulent et perdureront. Serait-elle la seule à être consciente de l'avenir et des valeurs sur lesquelles se bâtit toute démocratie ? Elle résiste, de son mieux, aux oppositions que rencontre sa politique d'accueil, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Allemagne ! Elle mérite notre soutien.

Priver les réfugiés de refuges serait ruiner le crédit moral et l'avenir politique de l'Europe tout entière. Nous ne tarderons pas à le constater. Il faudra bien, alors, nous aussi, faire face à nos responsabilités. L'Allemagne a besoin de la France qui ne saurait, plus longtemps, demeurer inhospitalière.

(1) Interview recueilli par le quotidien La Croix.
(2) Pape François. Où est ton frère ? Paroles sur les migrants et les réfugiés. Bayard, 2015.


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