vendredi 30 octobre 2015

Pourquoi lire : OSONS, le manifeste de Nicolas Hulot.


 Comme Indignez-vous, de Stéphane Hessel, Osons1, est un petit livre qui en appelle à chaque citoyen, pour qu'il change le monde qui l'entoure, et se change lui-même en adoptant un nouveau mode de vie.

Paru en octobre 2015, cet ultime appel à la mobilisation est « un coup de poing sur la table des négociations avant le grand rendez-vous de la COP21 », à Paris.

« Ce siècle sera écologique ou ne sera pas », lance-t-il d'abord. « L'écologie, à ses yeux, n'est plus un enjeu partisan, c'est un enjeu politique au sens le plus noble ».

« Penser écologique, c'est penser intégral, penser universel, avoir la Terre pour patrie et ne s'attacher qu'à cette seule frontière ».

Dans cette orientation, il n'est plus de politique qu'écologique et de vision de notre monde que planétaire. Les limites à fixer à notre action, à notre vie, sont celles de Terriens qui doivent faire avec les ressources qui sont renouvelables, dans un espace qui n'est pas extensible et auquel nous ne pouvons encore échapper.

Rien de neuf dans ces affirmations, mais l'ouvrage (bien écrit, aux formulations brèves et heureuses) est un outil pédagogique clair et porteurs d'espoirs à notre portée.

D'aucuns n'oublieront pas que Nicolas Hulot a conseillé aussi bien Jacques Chirac que François Hollande et ce rôle, qui l'a placé à proximité des Présidents français, lui est vivement reproché. Ceux-là ne liront même pas ce livre...

Ils auront tort. Ce « plaidoyer d'un homme libre » a ceci de neuf qu'il ne plaide, à l'évidence, pour aucune formation politique « de gauche, de droite ou du centre » et ne fait de cadeau à personne, pas même à ses lecteurs. Sa conviction déborde du cadre des idées toutes faites. Il se dit certain que « nous devons changer pour ne pas disparaître », car « aucun territoire, même le plus reculé, n'échappe à la blessure de l'homme » et « au plus profond des abysses, notre empreinte est visible ».

Nous subissons l'addiction du consumérisme, estime Nicolas Hulot, et sommes victimes d'un modèle productif qui nous a « engagés dans la société de production de masse ». Il est, pour lui, impératif, aujourd'hui, de changer de paradigme : retrouver l'origine du mot économie signifiant « gestion intérieure d'une maison » et viser « une prospérité sans croissance » selon la formule de l'économiste Tim Jackson.

Ainsi aboutit-il à affirmer que « tant que le profit restera la finalité ultime, on n'y arrivera pas » et qu' « il faut juguler la toute puissance de la finance ».

On peut encore insister sur toutes les ouvertures qu'il souhaite voir emprunter : « le solaire et l'éolien sont sortis de la préhistoire et sont, dès aujourd'hui, compétitifs » ; « la rénovation énergétique des bâtiments est une possibilité de création d'emplois et d'amélioration sociale et sanitaire » ; « la focalisation sur la croissance du Pib nous donne à croire que la pollution crée de la richesse, ( une marée noire augmente le PIB en générant une actuvité économique) » ; « mettons fin au gaspillage alimentaire : plus d'un tiers de ce qui est produit pour l'alimentation est jeté ». Etc.

Comme René Dumont2, premier candidat écologiste à élection présidentielle qui, en 1974, prêchait, dans le désert, comme Yann Arthus Bertrand3 qui, avec tout l'art d'un grand photographe, s'efforce de faire aimer et protéger la planète, comme André Gorz4, Hubert Reeves5, le Pape François6, (et d'autres encore...) qui se seront évertués à démontrer qu'une page s'est tournée et qu'on ne peut plus vivre comme des prédateurs ignorants de leurs propres intérêts, Nicolas Hulot nous alarme. Il a raison. Il découvre de plus en plus l'incompatibilité entre l'écologie et le capitalisme et, pour cela, il sera discrédité et rejeté, y compris par ceux qui pensent comme lui. Il le sait et n'en continue pas moins sa route. Il lui faudra aller plus loin encore dans sa condamnation du nucléaire et du système néo-libéral mais on ne peut mépriser son appel et son engagement.

1 Nicolas Hulot, Osons, Paris, éditions les Liens qui libèrent, octobre 2015
2 René Dumont, Comment je suis devenu écologiste, reprise de textes, éditions les Petits matins, mai 2014.
3 Yann Arthus Bertrand, Human, film, http://www.france2.fr/emissions/human.
4 André Gorz, Le fil rouge de l'écologie, éditions EHESS, 2015.
5 Hubert Reeves, Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve, Paris, Le Seuil, octobre 2015.
6 François (Pape), Laudato Si, Paris, éditions Bayard, Cerf, Mame, juin 2015.



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